Leoš Janáček (1854 - 1928) se révèle comme l'un des compositeurs européens les plus inventifs et les plus attractifs du 20ème siècle. Au cours de ses recherches personnelles, en marge des écoles, des styles et des esthétiques, il a su unir les ressources de la tradition et de la modernité. Le Mouvement Janáček en a fait son emblème pour l'ensemble de la musique tchèque.
Sous l’impulsion de son fondateur Guy Erismann, le Mouvement Janáček a mené pendant vingt ans un travail en profondeur pour que Janáček fut connu et reconnu en France à sa juste valeur et obtint une place méritée parmi les compositeurs dont les œuvres sont programmées et attirent le public. Choisir une œuvre pour aborder Janáček ? Les quatuors à cordes. Peut-être à cause du choc et du désir ardent d’entendre comment seule une bonne dizaine d’années le sépare de Dvořák ? Mais cédons la parole à Guy Erismann dont la biographie de Janáček montre bien l’exigence de vérité et la recherche d’une voie personnelle dictée par l’authenticité. Une lecture fourmillant de détails sur la richesse musicale en Bohême et en Moravie au 19e siècle et au 20e siècle avec l’installation de la jeune république tchécoslovaque. Ainsi, ce que l’auteur écrit à propos de la sonate Z Ulice (De la rue) : "Je pense que l’étude minutieuse de cette sonate, composée d’un seul jet, permet de bien comprendre le ‘‘secret’’ de Janáček ; combien ce style lui était déjà devenu familier, permettant d’entraîner l’expression immédiate de sa pensée, de ses émotions, de son dialogue intérieur. La sonate est aussi le témoin du tempérament dramatique du compositeur. C’est ici, d’une manière concise, la représentation d’un conflit psychologique et bien que les paroles soient absentes, on retrouvent les mêmes structures basées sur le principe des mélodies du langage. Autant dire que la formation qu’il s’était imposée portait ses fruits et qu’elle explique déjà sa fécondité prochaine dans un renouvellement facile et quasi intarissable de son écriture. C’est un phénomène presque unique que cette faculté de traduire en langage musical, d’une manière évidente, naturelle et immédiate, toutes les nuances de la sensation. Si l’on s’étonne qu’une telle méthode - qui en réalité n’en est pas une car elle ressort de la réaction spontanée - n’aboutisse pas à la redite mais féconde au contraire la diversité, il faut se rendre à l’évidence et reconnaître que nous entrons dans un domaine inviolable. On ne peut que l’expliquer par le rappel de l’éthique personnelle du compositeur fondée sur une grande curiosité en toutes choses, une référence constante aux sensations pures que sont l’enfance et la nature." (pp 115-116). On rapprochera avec intérêt cette analyse de ce que Grove écrit à propos de Pavel Haas, qui fut élève de Janáček. (Janáček ou la passion de la vérité, par Guy Erismann, éditions du Seuil, 1980, 352 p.)
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